Dans les années 1960, à Nouakchott, la capitale de la Mauritanie, Boubacar, alors jeune et plein d'espoir, fréquentait une école coloniale. Il apprenait avec admiration les leçons des Français, convaincu qu'ils étaient venus apporter la modernité et la civilisation à son peuple. Il croyait dur comme fer que la France était une puissance bienveillante, le pays des droits de l'homme et la fille aînée de l'Église.
Au fil des années, Boubacar, habillé à la française, parlant un français châtié et adoptant les traditions culinaires du colonisateur, s'efforçait d'imiter le modèle qu'il avait appris à admirer. Il était convaincu que les Français étaient venus en Mauritanie pour guider et commander un peuple qui, selon eux, ne pouvait pas se prendre en charge seul.
Mais un jour, une injustice le frappa. Un fonctionnaire français, méprisant et arrogant, le traita avec condescendance, remettant en question sa valeur en tant que Mauritanien. Cet incident fut le déclencheur pour Boubacar. Il réalisa que malgré tous ses efforts pour s'assimiler, il ne serait jamais vraiment accepté par ceux qu'il avait tant admirés.
À l'automne de sa vie, Boubacar, désormais âgé de 70 ans, décida de retourner dans son village natal, empreint de doutes et de questionnements. C'est là qu'il rencontra son petit-fils, Ahmed, un jeune homme fier de ses racines mauritaniennes et résolument opposé à la colonisation.
"Grand-père, il est temps de désapprendre ce que tu as appris," lui dit Ahmed avec conviction. "Nous devons préserver notre culture et nos traditions. Le français n'est pas notre seule richesse, nous avons notre propre langue et notre propre histoire."
Boubacar, touché par les paroles de son petit-fils, réalisa l'importance de se reconnecter à ses racines. Il comprit qu'il avait passé sa vie à chercher l'approbation des colonisateurs, au détriment de sa propre identité.
Il décida alors de désapprendre ce qu'il avait appris, de redécouvrir la beauté de la langue hassanya, de savourer à nouveau les plats traditionnels mauritaniens et de se plonger dans l'histoire de son peuple. Il comprit que la véritable modernité ne résidait pas dans l'imitation d'une autre culture, mais dans la préservation et la valorisation de la sienne.
Ainsi, dans le sable doré du désert mauritanien, sous le ciel étoilé, Boubacar trouva la paix intérieure. Il avait appris, mais surtout, il avait désappris. Et dans ce processus, il avait retrouvé son identité et sa fierté d'être mauritanien.
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